10 février 2010

Conclusion sur les assises de la ruralité

Ré-inventer un avenir pour les territoires ruraux, tel était l'enjeu fixé par les assises qui se sont tenues partout en France et dont la conclusion a été présentée hier à Morée par le Président de la République.

Plutôt qu'une ré-invention, plutôt qu'une vision globale de la ruralité dans un contexte mondialisé, nous avons assisté à une démarche à caractère "pragmatique" en forme de catalogue de bonnes intentions, visant à proposer des mesures qui se veulent concrètes et qui portent sur certains champs essentiels qui touchent nos territoires ruraux : la santé, les transports, les services aux personnes, l'activité économique, les circuits courts et l'agriculture, le fonctionnement des collectivités locales...

Sur la forme, le pragmatisme des propositions fait ressortir la teneur des débats et des idées qui ont pu être émises par les différents participants, élus, responsables associatifs, représentants des organismes consulaires et des syndicats. Des propositions qui sont donc concrètes, lisibles et pourquoi pas pertinentes. Je retiens notamment les propositions faites dans le domaines médical (encouragement à l'installation des médecins en zones rurales en contrepartie des bourses) ou bien celles visant à encourager la consommation des produits de proximité (circuits courts) dans les cantines scolaires.

Sur le fond, les intentions sont louables et attendues mais la question des moyens se pose inévitablement. Intervenir pour accompagner la ruralité dans toute sa diversité et ses dynamiques c'est considérer et affirmer plus que jamais que l'Etat joue un rôle et que celui ci sera encore plus accru demain.
Un Etat plus présent, plus utile, oui mais, le modèle actuel porté par la politique gouvernementale est plutôt en version "recul" et économies budgétaires. Pas un secteur n'est épargné, que ce soit la santé, l'école, le service postal, l'ensemble des missions qui sont celles de l'Etat, et pourtant les annonces faites visent à dire que demain il sera fait plus. Problème de cohérence. Et comment? Avec quels moyens? A budget constant, voir en régression, comment mettre en oeuvre ces orientations? La question reste posée.

Sur le fond, je retiens également une grande absente, l'agriculture, qui pourtant va de pair avec la ruralité. "Pas de ruralité sans paysans" écrivaient les agriculteurs sur leurs banderolles. Ils manifestaient nombreux sur les routes menant à Morée hier car ils subissent de plein fouet une crise sans précédent. N.Sarkozy a justifié cette absence en disant "l'agriculture fait partie de la ruralité mais la ruralité ce n'est pas que l'agriculture", certes.
Mais nos territoires ruraux, nos campagnes d'aujourd'hui ont bien été façonnées des siècles durant dans leurs paysages par les paysans, l'économie rurale est indissociable des retombées de l'agriculture et on ne peut évoquer l'aménagement des territoires ruraux en occultant que les agriculteurs sont encore aujourd'hui des acteurs majeurs, impliqués fortement dans la vie de leurs communes. L'agriculture et la ruralité s'écrivent au passé, au présent et nécessairement au futur, en ce sens, le discours prononcé par le Président de la République a manqué cet aspect primordial.

La feuille de route fixée par le Président de la République est concrète, elle l'est tellement que les paroles devront être suivies d'actes et que pour cela, la confiance, mise à mal aujourd'hui compte tenu des politiques qui sont conduites, des coups qui sont portés sur nos services publics, a besoin de preuves. Elles ne sont pas présentes actuellement.

Dans la contribution que j'avais rédigée fin novembre, j'écrivais "Réinventer la ruralité, c’est chercher le chemin du possible, c'est trouver dans la créativité les ressources nécessaires pour imaginer les services de demain, développer des activités qui permettront à chacune et chacun d'entre nous, aux différents âges de la vie, de vivre bien sur son territoire, de vivre et d'aimer son territoire".

Le discours prononcé à Morée a pu proposer quelques chemins sur une feuille de route. Mais, il reste à fixer un cap, une vision globale qui prenne la ruralité dans son ensemble : l'intervention de l'Etat ne doit pas se poser sous la forme d'un simple accompagnement aux territoires, mais doit s'appuyer sur politique réelle ambitieuse qui considère la ruralité aujourd'hui comme une terre en croissance, en mutation et en besoins nouveaux.

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