23 octobre 2006

La démocratie ferait-elle peur?

Encore un déluge de critiques à l'égard de Ségolène Royal, cela devient une habitude mais cela prouve une chose: c'est cette candidate qui fixe le débat, qui fixe les thèmes sur lesquels chacun est poussé à se positionner, et qui fixe les priorités derrières lesquelles chacun court ensuite.

Dans la lignée de la "révolution démocratique" proposée lors de la fête de la Rose de Frangy-en-Bresse sur les terres d'Arnaud Montebourg, porte-voix de ceux qui fondent la réforme institutionnelle comme l'une des priorités pour cette élection présidentielle, Ségolène Royal dévoile ses intentions pour remédier aux disfonctionnements nombreux de notre république. Sa force, c'est sa campagne qui se base sur une écoute constante et profonde des aspirations de nos concitoyens, c'est en soit une méthode profondément novatrice.

Taxée de populisme alors qu'elle n'est que le reflet de la nécessité de changer la donne démocratique, cette campagne déroute ceux qui incarnent une méthode politique basée sur le repli du mandat que l'on exerce sans rendre compte de ses choix ou de son action. Oui, il faut répondre à tous ceux qui se désespèrent de la politique, qui n'y croient plus en n'allant plus exercer un droit de vote conquis difficilement par nos ancêtres.

La démocratie participative est un moyen de l'exercice du pouvoir.
Le débat est plus que jamais ouvert, à chacun de s'en saisir pour faire profondément changer les choses en 2007.

Déclaration de Ségolène Royal:

Toute mon expérience politique m’a convaincue de l’obsolescence de certaines manières de faire et de gouverner. Beaucoup de bonnes intentions sont perdues, car les mesures, concoctées dans cercles trop étroits, manquent leur objectif. Faute qu’ait été pris le temps d’un diagnostic partagé et d’une construction plus collective de la décision.

Je crois aux vertus de la démocratie participative. Cela commence à se savoir. Chacun d’entre nous, chaque citoyen là où il est, dans sa famille, dans son quartier, dans son milieu de travail, dans son association, dans ses loisirs, est un expert légitime de la mutation de la France.
Parce qu’il vit un certain nombre de problèmes, parce qu’il a des projets, parce qu’il a des espoirs, parce qu’il s’interroge sur ce que vont devenir ses enfants, parce qu’il s’interroge sur ce que vont devenir ses parents qui vieillissent, parce qu’il s’interroge sur l’environnement, sur le cadre de vie que nous allons laisser aux générations futures.
Bref, je ne pense pas que les citoyens soient trop ignorants des affaires publiques pour s’en mêler, trop égoïstes pour concourir à la définition de l’intérêt général. Ou trop frileux pour regarder l’avenir en face.

Mais les citoyens ne s’impliquent que si le jeu en vaut la chandelle. S’ils ont le sentiment qu’ on ne les consulte pas seulement pour la forme. S’ils sentent qu’ils peuvent orienter directement les choix, y compris financiers.
Je suis de près, depuis quelques années les diverses formes et mécanismes de democratie participative : les budgets participatifs, les jurys de citoyens, les conférences de consensus à la suédoise.
J’organise, à Poitiers, depuis deux ans, un colloque annuel consacré a la démocratie participative. Avec des chercheurs, des praticiens et des chercheurs venus du monde entier.

Tous ces dispositifs de démocratie participative ont en commun de reconnaître la capacité d’expertise légitime des citoyens et de créer les conditions d’une délibération informée.
La démocratie participative ne s’arrête pas à la seule phase “amont” : préparation de la décision, décision, action : “écouter pour agir juste”. Pourquoi ne pas l’utiliser pour évaluer les résultats de l’action publique ? La responsabilité politique est mise en cause à chaque renouvellement électoral puisque les citoyens peuvent sanctionner les élus qui n'ont pas rempli leurs obligations.
Il n'y a aujourd’hui pas d'évaluation au long cours de l’action publique. J’ai proposé de créer des jurys de citoyens qui évalueraient les politiques publiques, par rapport à la satisfaction des besoins, ou par rapport au juste diagnostic des difficultés qui se posent, non pas dans un sens de sanction, mais pour améliorer les choses.
Ces jurys de citoyens pourraient être constitués par tirage au sort. Comme dans la Grèce antique.Pour évaluer les choix technologiques, les scandinaves et les britanniques constituent des jurys de citoyens par tirage au sort.
Si on admet que des citoyens sont aptes à formuler des recommandations sur des sujet aussi complexes que les biotechnologies, pourquoi ne le seraient ils pas pour évaluer l’action de leurs élus sur des sujets qui les concernent de prés ?
Et souvenons nous que la démocratie signifie d’abord le droit égal de « ceux qui n’ont pas de titre à gouverner » à s’occuper des affaires de la cité.Rendons lui, comme dit Jacques Ranciére, sa « puissance de scandale »

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